Portrait du mois de septembre

E. GUIGAL - Marcel et Philippe Guigal


Image actualité


« Nul bien sans peine ». La devise est inscrite au cadran solaire du Château d’Ampuis,
où les Guigal père et fils perpétuent l’œuvre entamée par le fondateur Etienne.

Vins améliorateurs
Ils parlent de travail. Du travail acharné qui triomphe de tout. « On n’a rien sans rien ». Pour aussitôt ajouter la qualité et le respect aux valeurs cardinales de la destinée familiale. Trois générations de Guigal, Etienne, Marcel et maintenant Philippe ont bâti l’une des maisons les plus réputées de France pour la qualité de ses vins et son enracinement rhodanien.
Les Guigal ont la passion du Rhône nord qu’ils ont contribué à faire reconnaître, rendant à la Côte-Rotie une partie de son prestigieux passé. Ils aiment la vigne, mais aussi l’Histoire et les livres. Et dans leurs livres, il est écrit que, 2 siècles durant, Côte-Rôtie et Hermitage étaient des « vins améliorateurs ».
Dans les années 20, les étiquettes de Château Lafite affichaient même « Lafite hermitagé ».
Et pourtant « au niveau des vins français, regrette Marcel Guigal, on cite Bordeaux, on cite Bourgogne, mais rarement la vallée du Rhône. Il faudrait que l’on récupère la classification des crus. Pour entraîner une région, il faut une locomotive. La locomotive, ce sont les crus : Côte-Rôtie, Hermitage, Condrieu, Châteauneuf ».

Croire aux crus
Ils ont tout. Les documents, les relevés de sol, les étiquettes, la légitimité. Marcel était même prêt à s’engager à ne jamais utiliser la mention premier cru sur ses propres Côte-Rôtie, alors même que la maison en possède les 2/3. Et pourtant, au moment du vote, le syndicat local a dit non. Qu’importe, chez les Guigal, on ne lâche pas l’affaire ! Et l’on continue à secouer le cocotier, considérant que cela permettrait de ressouder toute la famille rhodanienne, Châteauneuf-du-Pape compris. « C’est quand cela va bien qu’il faut le faire », estime Philippe. « Dans l’esprit du public, insiste Marcel, il faut qu’il y ait
trois grandes régions : Bordeaux, la Bourgogne et la Vallée du Rhône »

Faire ce que l’on sait faire
Par moments, ils se voient un peu comme les gardiens du temple. Les seuls en France à élever leurs grands vins au minimum trois ans et tant pis si les anges prélèvent leur part. Puiser tout ce qui est bon dans la tradition, sans rien céder à la vitesse ni à la mode. Voilà l’ADN Guigal. Pas question de laisser faire n’importe quoi. Comme par exemple d’envisager d’éclaircir la robe des rosés de Tavel pour se conformer au dictat actuel pour le pale. « Dans ce cas, on hurle, assure Philippe. Si Tavel commence à faire du Provence, ce n’est plus du Tavel et nous, on arrêtera, alors que notre première bouteille de Tavel, c’est 1942… ».

Esprit d’ouverture
Les Guigal père et fils débordent de projets. Après avoir développé leur vignoble, aujourd’hui l’équivalent de 75 hectares dont ils n’échangeraient pas un are, la famille, connue pour sa spécialisation dans l’amont, s’intéresse désormais à l’aval. Dans les cartons, l’ouverture d’une structure oenotouristique comprenant entre autres un caveau, en complément des fabuleuses caves familiales enfouies sous plus de 3 hectares sous la terre d’Ampuis. « Nous pourrons présenter les terroirs et la culture rhodanienne à travers une partie muséale. 2 400 ans d’histoire, c’est quand même quelque chose » s’enthousiasme Philippe. Le deuxième projet réunit les deux passions de la famille : le vin et le patrimoine. A Condrieu, ils ont racheté la Maison de la Gabelle, petit bijou du 16e de style  Renaissance, classé monument Historique dans les années 20. L’idée, en faire un hôtel boutique haut de gamme, une maison dédiée à l’hospitalité et à l’art de vivre.